Véronique Silver… C’était Madame Jouve

Le Monde du week-end (daté du 1er et 2 août) publie une brève nécrologie de Véronique Silver, actrice de cinéma et de très nombreuses séries télévisées. Âgée de 79 ans, elle a débuté en 1954 dans Si Versailles m’était conté…  de Sacha Guitry. Curieusement, cette nécrologie oublie de mentionner le personnage inoubliable qu’interprétait Véronique Silver dans La Femme d’à côté de François Truffaut (1981) : celui de Madame Jouve. Souvenez-vous, cette femme brune qui tenait le club de Tennis de Correnc, non loin de Grenoble, où Gérard Depardieu et Fanny Ardant se retrouvaient souvent, comme des amants obligés de cacher leur passion. Odile Jouve était la confidente de Depardieu, elle le reçoit dans sa cuisine et lui propose de partager son frichti. Madame Jouve était une femme rescapée de l’amour. Dans le film elle avait un léger boitillement, parce qu’un jour, par amour pour un homme, elle s’était jetée par la fenêtre… Et puis, vingt plus tard, un télégramme lui annonce que cet amant est de retour, ce qui plonge Madame Jouve dans la confusion. Elle était aussi la narratrice du film, celle par qui cette histoire d’amour entre Mathilde (Fanny Ardant) et Bernard (Gérard Depardieu) nous est racontée : Ni avec toi ni sans toi. Un rôle comme celui-ci ne s’oublie pas. Faute professionnelle ou faute de goût, le film de Truffaut, l’un de ses meilleurs, n’est même pas mentionné dans cette trop brève nécrologie. C’est injuste.

Véronique Silver avait également joué chez Resnais (Mon Oncle d’Amérique et La Vie est un roman), Chantal Akerman (Toute une nuit), Noémie Lvovsky (Faut que ça danse !, son dernier rôle au cinéma), sans oublier Jean-Claude Guiguet (Le Mirage, Les Passagers), Jean-Claude Brisseau (Noce blanche), Aline Issermann (Le Destin de Juliette), Joël Séria (Mais ne nous délivrez pas du mal), René Féret (Le Mystère Alexina), Jacques Renard (Blanche et Marie), Nadine Trintignant (La Maison de Jade), Luc Béraud (La Tortue sur le dos), Jean-Louis Bertucelli (Aujourd’hui peut-être, Stress) ou encore Alain Bergala (Où que tu sois). Son visage était familier grâce à de très nombreux rôles à la télévision. Elle était l’épouse de Henri Virlojeux, disparu en 1995, acteur d’innombrables films et téléfilms, figure incontournable du cinéma français, second rôle par excellence (dans Les Quatre Cents Coups, Virlojeux était celui qui surprenait Antoine Doinel et son copain René en train de voler une machine à écrire).  Mais elle était Madame Jouve, celle qui savait ce que veut dire l’amour.   

   

6 Réponses à “Véronique Silver… C’était Madame Jouve”

  1. Vince Vint@ge a écrit :

    Inoubliable Madame Jouve en effet.
     » La Femme d’à côté « , l’un des plus grands Truffaut.
    Un film d’une maîtrise absolue, tout en laissant passer les rêves, c’est rare au cinéma que cet entre-deux, entre mise en scène au cordeau et enregistrement du frémissement indicible de la vie.
    J’accroche nettement moins avec son suivant,  » Vivement dimanche ! « , le trouvant certainement trop  » calé  » dans un genre (le policier). Manquant de respirations buissonnières en quelque sorte. Mais son aspect léger,  » superficiel et léger  » comme le chantait Michel Berger, lui donne un certain charme. Puis le noir & blanc. Puis Fanny ardente. Puis…
    Et entre les deux amants de  » La Femme d’à côté « , ivres d’amour,  » celle qui savait ce que veut dire l’amour  » : Madame Jouve. Entre Mathilde et Bernard (immense Depardieu), comment l’oublier ?

  2. Le coin du cinéphage a écrit :

    Très bel hommage. Elle est aussi formidable dans la série TV de Serge Moati « Le pain noir », où elle joue une paysanne effacée, épouse d’Henri Virlojeux. Dans les Cahiers du cinéma N°408, mai 1988, rubrique « Fragments d’un dictionnaire amoureux », on retrouve cette citation : « La mère… et celle sans qui « La Femme d’à côté » ne serait qu’un beau film, et non un chef-d’oeuvre ».

  3. samia harrar a écrit :

    il est vrai que « La Femme d’à côté » de Truffaut, ça ne s’oublie pas. Madame Jouve non plus. Ce qui est très touchant par ailleurs, c’est la constance dans la fidélité à un personnage de cinéma qui a beaucoup compté, et dont on oublie un jalon essentiel dans le parcours de toute une vie. L’hommage touche en plein coeur…

  4. monia a écrit :

    Bonjour,
    pardonnez-moi si je vous écris ici, je n’ai pas trouvé d’autres moyens.
    J’aime bien le cinéma dont j’écris pour plusieurs revues du net, et voilà la raison pour laquelle je vous écris: depuis longtemps j’aurais aimé voir un film, Visage de Tsai Ming-Liang. Finalment j’ai eu le grand plaisir de pouvoir le voir et j’en suis restée bien touchée. J’en ai aimé surtout la figure de Jean-Pierre Léaud. J’ai écrit une critique sur ce film et je serais bien heureuse de pouvoir la montrer à Monsieur Léaud, je ne voudrais pas le faire pour me faire remarquer mais tout simplement parce que j’en serais orgueilleuse. Ce que je cherche c’est la possibilité de manifester mes sentiments et la joie que j’éprouve pour cette grande manifestation artistique.
    Je vous serais donc bien gré si vous pourrez m’aider à transmettre ma critique à Monsieur Léaud.
    J’espère de vous lire à ce propos et vous remercie bien pour votre attention.
    Avec mes meilleurs salutations,
    Monia

  5. Serge Toubiana a écrit :

    Chère Monia, il vous suffit de m’envoyer votre critique du film de Tsai Ming-Liang à la Cinémathèque (51 rue de Bercy 75012 Paris), je la transmettrai à Jean-Pierre Léaud. S.T.

  6. Vince Vint@ge a écrit :

    Quand on parle de Truffaut, Léaud n’est jamais très loin !