Archive pour le 09.2011

Soutien aux cinéastes iraniens emprisonnés

jeudi 29 septembre 2011

Les dernières informations en provenance d’Iran sont très alarmantes, elles concernent la situation des cinq cinéastes iraniens emprisonnés depuis le 18 septembre. Rappelons leurs noms : Mojtaba MIRTAHMASB, Nasser SAFFARIAN, Hadi AFARIDEH, Mohsen SHAHRNAZDAR, Marzieh VAFAMEHR, tous réalisateurs, ainsi que Katayoun SHAHABI, productrice de films.

Les médias gouvernementaux, les délégués du Sénat de Téhéran, le ministre de l’Information, celui de la Police secrète, le ministre de la Culture, le directeur général du ministère de la Culture, trois réalisateurs islamiques proches du régime, douze associations d’étudiants islamiques, le site du gouvernement et les télévisions, ont accusé les 6 réalisateurs arrêtés en les traitant d’espions, annonçant que l’espionnage en Iran était passible de longues peines de prison. Les familles des réalisateurs emprisonnés ont appris qu’elles n’avaient pas le droit de rendre visite à leur proche.

Le gouvernement iranien a également arrêté le caméraman, Touraj ASLANI, alors qu’il se trouvait dans un avion en partance pour la Turquie.
La Maison du Cinéma en Iran avait lancé un appel pour la défense et la libération des cinéastes emprisonnés. Les médias gouvernementaux ont annoncé que la Maison du Cinéma en Iran n’aurait désormais plus de reconnaissance officielle, accusée d’être un parti politique en contact avec l’étranger.
Selon nos informations, le gouvernement iranien a l’intention de museler tous les organismes et artistes indépendants.
Le ministre de l’Information en Iran a demandé aux familles des réalisateurs de s’en tenir au silence, et de ne pas évoquer la situation des cinéastes emprisonnés.
Un grand nombre d’artistes iraniens, en France, en Europe, au Canada et aux Etats-Unis, viennent de créer le Comité de Soutien aux Cinéastes iraniens Emprisonnés.
Contact du Comité de soutien : cinemairan@ymail.com

Nous avons besoin de votre soutien pour organiser ensemble des actions pour la défense des réalisateurs iraniens emprisonnés.

Signez la pétition sur www.cinematheque.fr

ou directement sur : http://www.ipetitions.com/petition/soutien-cineastes-iraniens/?utm_medium=email&utm_source=system&utm_campaign=Send%2Bto%2BFriend

Le Festival de Cannes, La Cinémathèque française, La SACD, La SRF, France Culture

Arrestation de 7 cinéastes iraniens

lundi 19 septembre 2011

Suite à une nouvelle offensive de la police secrète du régime iranien contre les milieux du cinéma, sept artistes de renommée ont été arrêtés durant le dernier week-end. Il s’agit de Mojtaba MIRTAHMASB (réalisateur), Nasser SAFFARIAN (réalisateur), Hadi AFARIDEH (réalisateur), Mohsen SHAHNAZDAR (journaliste et documentariste), Shahnam BAZDAR (réalisateur), Mehrdad ZAHEDIAN (réalisateur) et Katayoune SHAHABI (productrice de cinéma). Mojtaba MIRTAHMASB est coréalisateur, avec Jafar PANAHI, de Ceci n’est pas un film, qui sort en salles en France le 28 septembre 2011.

Ces artistes ont été arrêtés chez eux ou dans leurs bureaux.

Les agences de presse liées au gouvernement iranien ont publié une information selon laquelle les correspondants de la BBC à Téhéran auraient été arrêtés.

Les médias gouvernementaux tentent d’accréditer une version selon laquelle les cinéastes indépendants iraniens arrêtés seraient des espions au service de la BBC.

Selon les dernières nouvelles, les cinéastes qui viennent d’être arrêtés ont été transférés à la section 209 de la prison Evin à Téhéran. Parmi les récentes victimes de la répression en Iran, figurent de nombreuses femmes artistes arrêtées ces dernières semaines.

Mohammad Rasoulof en visite à la Cinémathèque

mercredi 7 septembre 2011

Ce matin, Costa-Gavras, président de la Cinémathèque française, et moi-même recevions la visite amicale de Mohammad Rasoulof, accompagné de Mohammad Reza Moini, son monteur. Mohammad Rasoulof est à Paris à l’occasion de la sortie en salles d’Au revoir, son dernier film présenté en mai dernier au Festival de Cannes où il reçut le Prix de la mise en scène dans la section « Un Certain regard ». La présence de Mohammad Rasoulof à Paris est en soi un événement. On sait que le cinéaste, comme son ami Jafar Panahi, est condamné à six ans de prison. Tous deux sont en attente d’une décision de justice, après qu’ils aient fait appel.

Au revoir sort aujourd’hui en salles : c’est l’histoire d’une jeune avocate à Téhéran, empêchée d’exercer son métier. Elle tombe enceinte et décide de tout faire pour quitter son pays, tandis que son mari, journaliste, vit dans la clandestinité. C’est un film à voir, d’une grande rigueur dans la mise en scène, interprété par une actrice de grand talent, Leyla Zareh (voir mon blog du 23 mai 2011).

Mohammad Rasoulof a réalisé ce film avec très peu de moyens et dans l’urgence, alors même qu’il était dans le collimateur de la justice iranienne. Une fois son film terminé, il avait pu le transmettre au Festival de Cannes sans attendre l’autorisation des autorités de son pays.

Au même moment, Jafar Panahi réalisait lui aussi un film, avec son ami Mojtaba Mirtahmasb : Ceci n’est pas un film. Ce film fut également projeté lors du dernier Festival de Cannes, sans que Jafar Panahi ni Mojtaba Mirtahmasb n’aient pu accompagner leur film, empêchés par les autorités iraniennes. Ceci n’est pas un film, qui sort le 28 septembre en salles, sera montré en avant-première le 19 septembre à la Cinémathèque, à l’invitation du Festival de Cannes, de la SACD et de la Cinémathèque française.

Nous avons appris, lundi 5 septembre, que Mojtaba Mirtahmasb, qui se rendait à l’aéroport avec sa femme et son fils, a été empêché de prendre un avion pour Paris. Les policiers lui ont confisqué son passeport, de même que ses affaires personnelles, ordinateur, portable, carnet de notes. Sa femme et son fils ont pu prendre l’avion et se trouvent à Paris. Mojtaba Mirtahmasb avait l’intention d’accompagner son film à Paris, avant d’aller à New York et Londres où il est invité par des grands festivals. Cette situation est plus qu’alarmante parce qu’elle montre une fois encore l’acharnement des autorités iraniennes à réprimer les cinéastes, à leur interdire de quitter le pays, et à censurer leurs œuvres.

Mohammad Rasoulof nous a dit qu’il avait deux projets de film, dont l’un se déroulerait en partie en Iran, en partie au Canada, et traiterait de la vie d’exilés iraniens. Nombreux sont ceux qui, parmi les intellectuels, les professeurs, les ingénieurs et les techniciens, les avocats, ont choisi de s’exiler. Ces hommes et ces femmes aiment leur pays, mais n’ont plus confiance dans l’avenir. Espérons que Mohammad Rasoulof pourra mener à bien ses projets en toute liberté. La Cinémathèque continuera d’affirmer son soutien aux cinéastes iraniens, en dénonçant la censure et les menaces d’emprisonnement qu’ils ont à subir en permanence de la part du pouvoir politique en place.

Hommage à Miss Shirley MacLaine

lundi 5 septembre 2011

C’est un immense honneur pour la Cinémathèque française d’accueillir Shirley MacLaine, en partenariat avec le Festival de Deauville qui la recevait hier. Alfred Hitchcock, répondant à François Truffaut, disait ceci : « Trouble with Harry était le premier film de Shirley MacLaine ; elle était très bien et je crois qu’elle n’a pas mal réussi par la suite ».

C’est un euphémisme.

En France, les cinéphiles vous ont adorée dans Some Came Running (Comme un torrent), réalisé en 1959 par Vincente Minnelli. Vous apparaissez, débarquant d’un bus, le rouge aux lèvres, la robe un peu fripée, à la suite de Frank Sinatra qui, ayant quitté le service militaire, revient à Parkman, Indiana, sa ville natale.

Vous étiez irrésistible !

D’emblée les spectateurs vous ont perçue comme une jeune femme moderne, libre, un peu paumée, avec votre sac à main en forme de lapin : une fille simple mais aimante et riante, ne sachant pas cacher un cœur d’or. Dès lors vous êtes devenue pour toujours la petite fiancée de l’Amérique. Même si la fin du film est tragique : c’est vous, qui êtes l’innocence même, qui payez pour les autres.

Vous êtes une actrice de comédie au talent incroyable : vous dansez, vous chantez, vous jouez à un tel rythme que l’on peut lire votre jeu sur votre visage où tout va à une vitesse folle. Mais il arrive parfois qu’une ombre passe, que votre personnalité change, se transforme, faisant basculer le film dans le drame.

L’année suivante, Billy Wilder vous a engagée pour jouer dans The Apartment (La Garçonnière, 1960), que nous avons choisi de projeter ce soir. Vous y êtes bouleversante, aux côtés de Jack Lemmon. À l’origine du film, Billy Wilder a raconté qu’il s’était souvenu de Brève Rencontre (Brief Encounter), réalisé par David Lean en 1945.

« C’est l’histoire d’un homme qui a une liaison avec une femme mariée et qui vient la voir à Londres par le train. Ils vont dans l’appartement d’un ami à lui. Je l’ai vu et je me suis demandé : “Et qu’arrive-t-il au gars qui doit coucher dans ce lit où ils ont fait l’amour ?” C’est un personnage intéressant. J’ai noté ça dans mon carnet, et j’ai aussi noté d’autres choses. Le héros de cette chose, c’est le type qui endure ça, il y a été amené par un mensonge. Un employé de sa compagnie lui dit qu’il a besoin de changer de vêtements, et il se sert de son appartement… et voilà.

J’ai repris le projet parce que nous venions de terminer Certains l’aiment chaud et que j’aimais tellement Lemmon. Certains l’aiment chaud, c’était la première fois que je travaillais avec Lemmon, et je me suis dit : “C’est lui. C’est le gars qui doit jouer le personnage”. Un peu ballot, comme on l’a dit, on le prend en pitié. Mais La Garçonnière, j’y ai pensé pendant des années avant que le projet soit vraiment activé. “Que va ressentir ce type qui couche dans le lit que les amants ont quitté ?” C’est vraiment comme ça que ça a commencé. J’ai pensé : “Ça va être censurable.” Mais j’ai gardé l’idée, et quand la censure s’est un peu relâchée on a pu faire le film. »

Vous êtes inoubliable dans The Apartment, dans le rôle de miss Kubelik – avec deux K. Votre prénom est Fran, vous êtes liftière, un poste subalterne dans la grande compagnie d’assurances dont le patron est Fred MacMurray (Jeff D. Sheldrake), et où travaille C.C. Baxter (Jack Lemmon). Souriante, toujours aimable avec le personnel qui prend l’ascenseur le matin pour aller au travail, et le soir pour retourner à la maison. Vous êtes amoureuse du patron, un homme marié et cynique, ce qui vous met dans un drôle d’état.

Billy Wilder dit de vous que « vous étiez une professionnelle, capable de jouer la comédie, mais aussi des rôles plus sérieux ». Dès qu’on vous aperçoit, on y croit, on a envie d’y croire. Une belle frimousse, la coupe de cheveux, le rire facile. La séduction opère d’emblée. Et vous êtes dans le rythme de la comédie, cette chose si importante dans les films de Wilder, comme dans ceux de Lubitsch, McCarey, Capra ou Mitchell Leisen.

Vous êtes surtout une actrice moderne, qui ne s’apitoie pas sur elle-même, même lorsque vous prenez une bonne dose de somnifères, dans un moment de détresse. Vous ne pleurez pas sur votre sort. C’est la raison pour laquelle ce film n’a pas vieilli. Et il est à la gloire des paumés, Fran Kubelik et C.C. Baxter, ceux qui n’ont pas droit au chapitre dans l’Amérique triomphante des grandes compagnies.

Billy Wilder a de nouveau fait appel à vous, cette fois pour incarner une Française dans Irma la douce. Cette fois encore avec Jack Lemmon comme partenaire. Ayant joué un tel rôle, celui d’une prostituée au grand cœur, il est normal que la France vous adopte et vous aime. Et vous remette aujourd’hui, des mains de Frédéric Mitterrand, ministre de la culture, la Légion d’honneur.

Vous dîtes souvent avoir plusieurs vies. Dans votre vie d’actrice, vous avez rencontré des cinéastes d’envergure comme William Wyler, Frank Tashlin, Robert Wise, Don Siegel, Bob Fosse, Herbert Ross, Mike Nichols, Hal Ashby, Vittorio de Sica, entre autres. Et vous avez été la partenaire d’acteurs prestigieux comme Sinatra, Dean Martin, Jack Lemmon, Clint Eastwood, Robert Mitchum, Jerry Lewis, Peter Sellers ou Jack Nicholson. J’ai un souvenir très fort de Terms of Endearment (Tendres passions), réalisé par James L. Brooks, film pour lequel vous avez reçu l’Oscar en 1983.

Jouer la comédie, danser, chanter, travailler pour la télévision, réaliser des documentaires, sont autant de vies différentes. Ecrire des livres aussi, pour raconter votre vie de star ou pour partager vos idées ou vos croyances concernant la méditation spirituelle.

Nous sommes admiratifs de vous voir ainsi naître et renaître, d’une vie à une autre, avec ce regard souriant et gai, cette vitalité et ce talent. Sans doute êtes-vous une rebelle, quelqu’un qui échappe aux classements et aux codes, à l’ordre établi. Vous avez le don d’être libre et indépendante, fière de ce que vous êtes : une personne remplie de talents multiples. C’est pour cela que nous vous admirons, depuis si longtemps, et sommes si heureux de vous avoir parmi nous.